Si le digital est devenu incontournable, la mise en avant dans les points de vente reste indispensable. Ces dernières années, les codes ont changé pour enrichir l’expérience client.
Les négoces doivent évoluer, dans certains cas encore, de « dépôts points de vente » à lieux d’expérience en s’appuyant sur la force des industriels.
Interview Négoce Magazine - Octobre 2020
Propos recueillis par Franck Guidicelli
Communiquer sur les produits à grand coup de publicité et d’annonces sur les prix semble bien terminé. Aujourd’hui, le merchandising prend une autre forme et, chez les industriels comme chez les distributeurs, la perception de ce sujet a bien évolué. Pour Paul Ricateau, directeur associé de l’agence de communication Convergence (ndlr, spécialisée sur les marchés du BTP, construction et habitat), plusieurs éléments aident à comprendre cette évolution : « Le premier point concerne le contexte de profonde mutation du marché, avec une interrogation forte sur le rôle des négoces et leur valeur ajoutée, alors qu’ils doivent faire face d’un coté à la concurrence des grandes surfaces de bricolage, de l’autre aux industriels qui communiquent en direct auprès des installateurs. Le tout sans oublier le digital et la montée en puissances des pure-players qui changent les règles du jeu ! »
Il est donc légitime de s’interroger sur le rôle que le négoce doit jouer en 2020, toujours selon Paul Ricateau : « Les négoces prennent conscience que leur rôle évolue et qu’ils ne peuvent plus être de simples distributeurs : ils devront devenir des lieux de vie, de partage et d’expertise au service des professionnels. Les points de vente devront se réinventer comme lieux d’expérience pour les clients. Ils doivent permettre aux artisans de monter en compétences en proposant, par exemple, des temps forts ou des corners spécifiques consacrés à la formation, la veille réglementaire ou aux services. »
Mettre en avant les services
Le service devient la pierre angulaire de la communication et du merchandising, car les négoces doivent élaborer des stratégies pour se battre sur autre chose que le prix (ndlr, dans l’optique de redonner de la valeur au produit - voir notre précédente interview). Chez les industriels, par exemple, la tendance porte clairement sur l’intérêt que va apporter l’utilisation d’un produit ou système pour les artisans sur leur confort de pose, le gain de temps, la productivité... Pierre Boumard, dirigeant de Brands at Work, y voit même un impératif : « Aujourd’hui les offres se ressemblent beaucoup, il faut donc toujours proposer plus de services et le faire savoir pour se différencier. Cela permet d’offrir une vraie source d’exclusivité, et l’exclusivité crée très souvent la préférence. » Le merchandising doit donc être abordé de façon beaucoup plus globale et non se limiter au chantier. Il doit être plus largement orienté sur les moyens de mieux travailler en ayant recours, pourquoi pas, à des partenaires prestataires de services pour faire partager leurs expériences.
Devenir des lieux d’expérience
« Il faut des espaces d’expérience dans un point de vente », pense Paul Ricateau. « Ils peuvent être travaillés en nom propre ou en s’appuyant sur les industriels partenaires avec des PLV conceptuelles ou des approches shop-in-shop valorisant un univers ou un service spécifique (comprendre les certificats d’économies d’énergies, des conseils de protection, les astuces en matière de gestion d’entreprise…). Les industriels doivent accompagner les négoces en leur apportant des outils pour mieux conseiller, pour mieux accompagner, pour mieux vendre. Ils doivent aussi être force de proposition dans l’animation des points de vente, avec, par exemple, l’organisation de journées thématiques (test produit, formation…). »
Ce partenariat industriel-négoce doit forcément bénéficier aux cients, selon Pierre Boumard : « Les artisans n’ont pas le temps, ils doivent être rapidement débarrassés des choses contraignantes pour avoir des informations de qualité durant la période passée dans les points de vente. Il faut donc mettre en place des aides au repérage, des ILV, des PLV didactiques pour les aider dans leur choix. Les artisans ont toujours un peu de mal à demander et, dans le même temps, les points de vente sont les seuls endroits où, en tant que clients, ils peuvent se le permettre. Les points de vente sont en quelques sorte un refuge pour les professionnels, ils attendent de s’y sentir bien et d’être guidés. » (Au-delà, à l’heure du numérique où tout se trouve en quelques clics, le point de vente représente une source d’information fiable et d’accompagnement personnalisé).
Le digital est indispensable
« Le merchandising concentre de nombreux sujets et les négoces doivent évoluer – dans certains cas encore – de « dépôts points de vente » à lieux d’expérience en s’appuyant sur la force des industriels », conseille Paul Ricateau. De nouveaux leviers digitaux doivent leur permettre de franchir ce pas avec les outils de réalité virtuelle / augmentée ou les configurateurs 3D. Ce sont de véritables arguments pour que les artisans fassent venir leurs clients sur les points de vente pour leur faire vivre une expérience proche de ce qu’ils pourront expérimenter dans les enseignes grand-public.
« Aujourd’hui, il faut investir sur le digital en faisant tomber les frontières entre numérique et point de vente. C’est la continuité du parcours client, résolument omnicanal et phygital, qui sera à même de proposer l’expérience la plus fluide. » selon Paul Ricateau. Pierre Boumard insiste tout de même sur quelques limites à garder à l’esprit : « Il est primordial d’intégrer la digitalisation dans les points de vente pour avoir une approche que l’on peut appeler « phygitale » mais cela sera efficace seulement si le service rendu représente un véritable plus, il faut éviter de tomber dans le gadget. Il convient de privilégier des suppléments digitaux avec de vraies interactions entre le physique et le digital avec un esprit identique : clarifier l’offre, aider au repérage et au choix. »
De même, les réseaux sociaux sont de plus en plus utilisés pour communiquer, mais surtout pour créer du lien et renforcer la proximité avec les clients. Mais attention, « l’aspect humain est évidemment très important, car c’est souvent le contact qui va faire la qualité de l’échange » avertit Pierre Boumard. « Parce que l’efficacité du merchandising reste une affaire de proximité : bien identifier sa cible et le contexte local permet d’apporter les bonnes réponses aux questions des clients et de les rassurer. »
Pour en savoir plus, prenez rendez-vous avec un directeur conseil !